23.3.11

La colère nous rendrait plus ouverts d'esprit

Nos émotions et notre bon sens nous enjoignent à nous éloigner des personnes en colère et à penser que nous n'en tirerons rien. L'image associée à l'ouverture d'esprit appartient plutôt aux personnes calmes et pondérées.
Néanmoins, et contre toute attente, cette recherche nous prouve le contraire.
Dans deux expérimentations, Maia Young et ses collègues ont testé les effets de la colère sur le fait de s'exposer volontairement à des informations qui contrecarrent les idées préalables que l'on peut avoir sur un sujet donné, la plupart des personnes ayant une tendance naturelle à rechercher des informations confortant leur idée de base. On les dit alors "biaisés" dans la mesure où leur opinion est déjà faite. Jusque là, les recherches rapportaient que les gens dépassaient plus volontiers leurs biais si l'on attisait leur esprit critique ou s'ils étaient de meilleure humeur.
Young et ses collègues ont émis l'hypothèse qu'une personne en colère, plutôt que triste ou d'humeur neutre, ressentirait l'envie de "s'opposer", y compris en recherchant des informations contradictoires.
Les 97 étudiants, participants de la première expérimentation, recrutés pour leur croyance dans la prévention des accidents de la route par l'utilisation du kit mains libres, devaient dans un premier temps se souvenir d'un moment d'intense colère ou de tristesse ou d'un moment neutre. On leur proposait ensuite de lire au choix des articles concernant la sécurité routière accrue par le kit mains libres, ou des articles montrant qu'il n'existait aucune différence au niveau sécurité entre l'usage du téléphone et celui du kit mains libres. Les participants en colère se sont montrés plus volontaires pour lire des articles contraires à leur opinion de départ. 
Dans la deuxième expérimentation, les chercheurs ont mesuré la colère ou la tristesse et ont ensuite confronté les 89 participants adultes à des articles pour ou contre leurs opinions politiques. De nouveau, les participants s'étant remémorés un moment d'intense colère, au point d'avoir le désir de frapper un objet ou d'agresser quelqu'un, se sont montrés plus volontaires pour lire des documents contrecarrant leurs opinions.
Les chercheurs en concluent que dans un débat, les personnes qui s'emportent le plus fort se feront probablement dans un deuxième temps l'avocat du diable. Faut-il donc mettre les gens en colère pour leur ouvrir l'esprit ? 
Source : Young, M., Tiedens, L., Jung, H., and Tsai, M. (2011). Mad enough to see the other side: Anger and the search for disconfirming information. Cognition and Emotion, 25 (1), 10-21 DOI:10.1080/02699930903534105